C’est une promesse. Une simple promesse aux profondes ramifications qui nous a ouvert les portes de la Birmanie. La promesse virtuelle d’un monde qui semblait immobilisé dans les arcanes du temps. Le murmure d’une société figée dans le passé. Le murmure d’une société comme pétrifiée dans une sorte d’image d’Épinal, loin, bien loin, des assauts de la modernité. La réalité nous a en chemin rattrapé.

La Birmanie se développe bien plus vite que ses vieux trains quelques peu crasseux et assoupis ne le laisserait deviner. Par quelques aspects, elle file droit vers son idéal, sa sœur thaïlandaise. La capitale birmane, Yangon, se rêverait en copie de la rutilante Bangkok. Sur le chemin de la modernité, des problèmes de santé nous ont eux aussi rattrapé. Je fus alors bien content de vérifier que les hôpitaux birmans n’étaient pas aussi arriérés que l’image que je me faisais du pays. Les médecins birmans m’ont délivré rapidement des maux les plus importants bien qu’une grande fatigue et quelques complications me rendaient la vie quotidienne plus difficile. Au final, j’attendais le retour en France comme un délivrance. Je me demandais si, en Birmanie, face aux circonstance, j’étais devenu totalement hermétique à l’appréciation des petits plaisirs simples du voyage. Je pense que je n’en étais pas loin… et puis arrivèrent les 3 jours de trek de Kalaw à Inle

Trek de Kalaw à Inle

Je vais vous livrer une synthèse rapide. Pour ceux qui veulent parcourir la version longue et plus détaillée de cette courte mais belle randonnée de 3 jours, ils peuvent commencer le récit ici, sur mon blog outdoor 1001pas.

Ce trek birman de la ville de Kalaw au lac Inle est une randonnée accessible à tous et à toutes, même aux grands débutants. La marche fait environ 50 à 65km suivant la formule et demande environ 5h à 7h de marche tranquille, découpée de pauses et de siestes sur les sentiers.

Depuis notre arrivée à Kalaw, j’avais beau avoir envoyé quelques mails pour m’informer des conditions de participation à cette randonnée, rien de concluant n’en était sorti. Certains ne répondaient pas. D’autres m’annonçaient qu’en hors saison, il n’y aurait personne sur le trek de 3 jours avec qui partager les coûts. Enfin, certaines agences s’essayaient à ce qui était devenu visiblement un jeu national: tenter d’extirper du touriste un prix minimum 2 à 3x fois supérieur par rapport au prix moyen et ce, pour un séjour plus court. Bref, rien de neuf pour le touriste lambda que j’étais. Je me demandais néanmoins si, au vu de la réalité du terrain, j’allais, ou non, pouvoir la faire cette randonnée.

C’est un rapide échange avec un voyageur francophone dans notre hôtel qui me convainc, dès le lendemain, de modifier mon approche. Tester le terrain. Non le terrain du virtuel mais bien du réel. Je toque donc d’agences en agences et je tombe sur un adorable couple franco-suisse qui souhaite lui aussi profiter d’une aventure trekking en Birmanie.

Départ du trek de Kalaw

Quelques mots plus tard, nos sacs prêts, à 8h30 le lendemain, on se retrouve à 5 avec notre guide birman Joalene sur les routes birmanes. Et là, c’est, dès le premier repas du midi, une douce révélation. Je n’ai pas forcément à craindre la cuisine birmane. Tout est savoureux, sans facture exorbitante à la clé, sans négociation pour éviter les glaçons dans le lassi. Sur les sentiers birmans sur lesquels il m’aurait été impossible de retrouver mon chemin seul sans une carte et un boussole, notre guide nous emmène à travers les villages de Kyauk Su Poah et de Taung Thu Paoh. A ce jour, je me maudis encore. Je me maudis encore d’avoir été trop faible pour me balader dans les villages vers les premières lueurs aux alentours de 5h du matin. C”est vers ces heures que les locaux arpentent déjà les routes, réglés, eux, sur les heures oh combien plus naturelles du soleil. Mon corps, lui, ne pouvait pas suivre. Mon corps me demandait du repos. Il rêvait de sommeil. Non que la route sur cette randonnée soit si longue ou escarpée, mais le soleil tape fort et je me remettais toujours de mon intoxication alimentaire depuis Mandalay.

Impressions du trek de Kalaw

Les 3 jours de randonnée, un peu trop courts à mon goûts, passèrent ainsi. De bons petits repas en bons petits repas. De quelques sourires échangées avec les enfants. De sourires adressés aux agriculteurs et surtout agricultrices qui bêchent et labourent leurs champs d’épices, de tomates, de maïs avec parfois l’aide de leurs massifs buffalo qui font la richesse et fierté de leur propriétaire.

C’est ce retour à la simplicité qui me fit tant de bien. Loin des pollutions de toutes sortes. Loin de tout sauf peut-être de quelques araignées et souris dans les pièces communes dans lesquelles nous passions la nuit.

Je crois que j’aime tout simplement la nature plus que la vie citadine surtout lorsque celle-ci rime avec bruit, difficulté de respirer, chaleur à étouffer, frénésie ambiante, mélangé chaotique entre modernité et héritage culturel délabré. Je crois que j’ai du mal à trouver ma place dans cet environnement quand bien même et surtout lorsque la maladie et quelques petites arnaques financières du quotidien mon rendu méfiant. C’est ce poids et l’expérimentation du concept de charge mentale en voyage dont je parle dans un article ici, que j’ai vécu pour la première fois de manière si intense qui m’ont tant fait regretter, jusque là, ce séjour.

Marcher est ma forme préférée de méditation. Le corps se trouve rattaché à la terre, l’esprit quant à lui, s’élève vers d’autres cieux ou les blancs sommets. Aussi étrange que cela puisse paraître, après une bonne nuit et un repas en refuge, je me sens régénéré.

Ce trek de Kalaw à Inle à recharger mes batteries internes. Il m’a quelque peu réconcilié avec la Birmanie. Au fond, loin de temples qui ont éveillé ma curiosité un jour ou deux et puis je ne pouvais plus les voir en pâture, je pourrai marcher de village en village, avec un guide pour boussole (car traverser les champs reste un labyrinthe et mon birman se limite à ce jour à bonjour et merci, en version courte).

Une fois arrivé à Inle, bien qu’une voyageuse nous avait déconseillé de nous y attarder, paradoxe amusant, c’est celle-là même qui a réalisé la vidéo qui nous a donné envie de venir ici, on a vraiment apprécié…

Lever du soleil sur le lac Inle

Sur le chemin du retour direction l’hôtel, une fois que nous avons dit au revoir à notre guide lors d’un dernier repas, on traverse le lac Inle jusqu’à notre hôtel.

Notre guide Joalene nous a mis en contact avec un conducteur de bateau qui nous a fait découvrir, dès le lendemain de notre retour de trek, ce dernier au lever du soleil.

Je vous avoue que, bien que le trek de Kalaw et Inle ne soit pas si intense et éprouvant, le réveil aux alentours de 5h du matin dès le lendemain du retour ne fut pas chose facile. Néanmoins, pour faciliter votre effort, la récompense est belle.

Certes on rencontre quelques faux pêcheurs qui prennent la pause en tenue traditionnelle pour quelques billets(200, 500 kyats par personne, loin, bien loin de ceux des tarifs des pêcheurs au cormoran de la rivière Li en Chine) avant de rencontrer les vrais, à la posture moins photogéniques et au maillot de foot Ronaldo, mais surtout, on fait la rencontre avec le lac Inle aux aurores. On prend un café sur le marché birman et on se perd dans cette effervescence matinale. J’ai sorti le drone pour l’occasion, j’avoue que l’eau n’est pas son élément préféré mais, fort heureusement pour moi, avec un peu d’adresse, j’ai pu lui éviter une triste fin au fond du lac et, surtout, lui et moi, on a rapporté quelques belles images.